« Come Undone... » | End.

L’enfant reposa le crayon rouge qu’il tenait dans sa main gauche. Un air concentré sur le visage, ainsi qu’un bout de langue sortant de ses lèvres rosées, il regardait de ses petits yeux noisette le panel de stylos qui s’étalait devant lui. Pour son œuvre, il avait déjà utilisé une harmonie de rouge-orangé, et il avait l’impression qu’il manquait une touche de quelque chose pour rendre son dessin exceptionnel. Saisissant un crayon marron glacé, il le fixa, le faisant tourner du bout des doigts, s’interrogeant pour savoir si c’était le crayon.

Quiconque aurait observé la scène se serait étonné du sérieux de l’enfant face à un simple dessin. Mais même à cet âge, le jeune Ethan faisait déjà preuve d’un certain perfectionnisme envers ses dessins.. Surtout envers ses dessins. Le garçonnet souhaitait que les mondes qu’il inventait dans son esprit soient aussi réalistes et conformes que possible sur la feuille blanche. Et les nombreuses illustrations qui tapissaient le sol de sa chambre ainsi que son mur prouvaient que l’enfant avait de quoi se vider l’esprit. Et plus les années passèrent, plus la chambre fut ensevelie sous des papiers comportant des esquisses, de plus en plus réussies au fil de l’âge…

Et voilà. Ses valises à ses pieds, Ethan regarda une dernière fois la maison qui l’avait abrité durant son enfance. Au bout de dix-sept années de vie plutôt chaotique, le voici qui quittait son refuge pour commencer une nouvelle aventure. Et surtout, partir… s’éloigner de son père oppresseur et de sa mère froide et indifférente en sa présence.

Que ferait-il, lui, pas encore majeur, sans argent et les comptes bloqués par ses parents ? Vivre dans la rue n’était pas quelque chose à laquelle était préparé le jeune homme, sa fierté lui rendant la tâche difficile lorsqu’il était question de demander de l’aide. Mais il n’était pas envisageable pour lui de rester une minute de plus dans la demeure familiale. Toutes les règles de bienséance que lui inculquaient ses parents, et la cadre dans lequel ils voulaient le faire entrer n’étaient pas aux goûts de Ethan. Il avait bien d’autres projets plus intéressants à l’esprit, et devenir le successeur de son père à la tête de l’entreprise familiale ne faisait pas parti de ceux-ci.

Un frisson d’anticipation parcouru le corps du brun. Il était livré à lui-même désormais. Nul doute qu’en franchissant le portail de la bâtisse, ses parents l’avaient rayé à jamais de leurs mémoires. Ils n’avaient plus de fils dorénavant… L’idée n’attrista pas le jeune homme. Il était certain qu’il s’en sortirait, qu’il accomplirait ses objectifs et ses rêves, et ce même s’il devait passer un certain temps dans la plus basse classe sociale. Tourner le dos à sa famille était un piètre sacrifice.

Saisissant ses bagages et n’accordant plus un seul intérêt à la demeure de son enfance, Ethan s’enfonça dans les profondeurs de la nuit, laissant ses pas le guider vers ce qui serait son futur proche…

Le bruit d’un briquet qu’on allume se fit entendre dans la pièce silencieuse. La bouche close sur sa cigarette, l’individu inspira avec habitude sa première bouffée de fumée, celle qui lui apportait un vague de bien-être et de sérénité. Le bout rougeoyant de la cigarette se détachait dans la pièce obscure, et l’odeur du tabac se mêla à celle de sueur et de sexe, encore présentes malgré l’heure avancée de la nuit. Assis au coin du lit double, vêtu en tout et pour tout de son boxer noir, le fumeur détaillait avec détachement et nonchalance le misérable papier-peint qui tapissait les murs de la chambre. A quelques endroits se devinaient des taches dues à l’humidité tandis que, près des meubles surtout, le papier peint se détachait de la paroi, donnant un air encore plus délabré à la pièce.

Mais cela, le jeune homme n’y prêtait plus attention. Les vieux hôtels, les lits inconfortables, les petites fenêtres donnant vue sur les routes passantes… tout cela faisait parti de son quotidien depuis maintenant quasiment trois ans.

Posant sa tempe contre sa paume, la cigarette callée entre l’index et le majeur, le jeune homme expira la fumée qu’il maintenait dans sa bouche, se délectant du bien-être qui l’envahissait grâce au tabac. C’était le seul moment où, fumant avec calme, il se permettait d’être lui-même, de laisser entrevoir ses sentiments sur son visage, qui se revêtait d’un masque d’indifférence et de neutralité dès la clope terminée. Il ne voulait pas que les autres puissent profiter de cet instant de faiblesse contre lui.

Un grincement du lit derrière-lui le fit sortir de sa torpeur. Les yeux fermés, il imaginait les moindres mouvements de l’homme qui se réveillait. Georges, car c’est ainsi qu’il se nommait, ouvrait d’abord les yeux doucement, tentant de deviner après cette nuit agitée où il se trouvait. Ses réflexions en place, il se passait ensuite une main sur le visage, avant de s’asseoir avec minutie sur le lit, encore pataud par le sommeil. Puis, ramenant le drap à lui pour dissimuler son anatomie, il cherchait du regard son jeune amant de la nuit.

« Ethan ? »

Pour finir, il l’appelait faiblement, avant de s’avancer en sa direction et de se placer dans son dos, fixant la nuque du brun. C’était seulement à partir de cet instant que ledit Ethan expirait une dernière fois la fumée de sa cigarette, l’écrasait contre un cendrier à terre et se retournait pour observer l’homme, l’interrogeant du regard. Georges était le seul avec qui il se permettait de rester jusqu’au petit matin, sachant qu’il ne serait pas menacé en sa présence une fois son corps donné. L’homme de cinquante-cinq ans était un habitué. Le premier client de Ethan. Alors au bout d’un certain temps, des habitudes s’étaient prises, et une certaine sorte d’amitié s’était mise en place entre eux. Le jeune prostitué savait qu’il pouvait compter sur l’homme en cas de problèmes, ce qui n’était pas le cas avec ses « collègues » ou bien ses autres clients.

Mais à ce moment, Ethan sentit que quelque chose n’allait pas. L’habitude à laquelle ils étaient habitués allait être bouleversée, il en était certain. Une sorte d’intuition, ou du moins, la petite étincelle d’incertitude et d'aspiration qui brillait dans les yeux de Georges lui faisait semer le doute. Et lorsque l’homme ouvrit la bouche pour prononcer ces cinq mots fatidiques d’une voix implorante, le brun comprit que plus rien ne serait comme avant…

« Viens sur Oxymore avec moi. »

ohmygad! j'aime en tout point. le personnage qu'est Ethan, ta façon d'écrire si fluide qu'on pénètre carrément dans ton esprit et puis la chanson d'into the wild, forcément. et puis, sans oublier Kevin, le meilleur, j'adore ! Bienvenue ! :)

( ça me fait penser qu'il serait temps que je termine ma fiche moi... pffiou. Je vais finir à la bourre, comme d'habi. Raah. )