Maëlle • let your memories grow stronger and stronger

Chaque année, tous les habitants de l'île reçoivent dans leurs boîtes aux lettres un courrier venant directement du bureau des dirigeants d'oxymore. Ils y trouvent, simplement, un formulaire truffé de questions indiscrètes sur leur passé ainsi que sur leur existence actuelle, chacune savamment posée pour vérifier que ce sont des individus inoffensifs.
Ainsi, vous devez répondre à cet interrogatoire en tentant d'être le plus honnête et explicite possible. Nous comptons sur vous pour développer vos réponses.

• bonjour, mademoiselle, madame, monsieur. Nous sommes bien entendu heureux de la population de notre île mais voulons en savoir plus sur celle-ci, comme à toutes les années. Tout d'abord, qu'est ce qui vous a poussé à venir vous installer à Oxymore ou à y rester?
Et bien, je ne suis jamais venue m’installer à Oxymore. C’est-à-dire que je suis née ici. Ce sont mes parents qui, après le mariage, ont décidés de changer d’air, de s’éloigner de leurs beaux-parents respectifs et de vivre leur propre vie loin de cette routine habituelle dans la Grande Pomme. Je reste à Oxymore pour plusieurs raisons: en premier lieu, ma vie est ici, je ne me vois pas recommencer à zéro dans une ville qui m’est inconnue et surtout seule. Je ne supporte pas la solitude, si vous voyez ce que je veux dire. Et puis, mes amis et mes parents sont ici. Je ne pourrais pas partir d’ici.

• avez-vous déjà eu quelques problèmes avec la justice, lors de votre enfance, adolescence, ou plus récemment? Ou bien êtes-vous blanc comme neige? Ne vous inquiétez pas, rien de ce que vous écrirez ici ne se retournera contre vous.
Quel genre de problème avec la justice ? Ça dépend de ce que vous voulez parler. Je ne suis pas blanche comme neige, rare sont les personnes qui le sont. Mon infraction n’était rien de bien grave, j’ai juste fait un petit excès de vitesse sur la route, lors de mes vingt ans. Je devais aller rejoindre ma mère pour dîner et évidemment, j’étais en retard, comme ma chère maman n’aime que les personnes ponctuelles, j’ai décidé d’accélérer. Ce qui m’a valut une belle grosse amende et un repas gâché. C’est la seule chose qui m’est arrivé. Je ne supporte pas la violence, quelle soit physique ou morale, c’est une des choses que je ne peux pas accepter.

• avez-vous déjà regretté cet exil sur l'île, avez-vous déjà envié l'existence banale des autres individus de cette planète?
À vrai dire, il y a des jours où je me dis que la vie serait peut-être plus facile ailleurs mais ce n’est qu’une passe, ça doit n’être qu’une mauvaise passe. Je ne pense pas pouvoir vivre dans une de ces villes remplies de voitures, de taxis ou même de bus. C’est trop…touristique. Oxymore, ce n’est pas pareil. Il n’y a pas ces embouteillages à longueur de journées, ces coups de klaxons de sept heures à vingt-deux heures. J’avoue exagérer un peu, mais non, je ne pense pas envier des personnes étrangères.

• Quel a été le plus bel instant de votre existence?
Ce serait trop difficile de choisir un bel instant car il y en a eu plusieurs. Je n’arrive pas et ne peux pas faire un choix, ça signifie peut-être qu’aucun moment ne m’as vraiment marquée. En premier lieu, il y a cette rencontre avec ce garçon lors de mes seize ans, je me souviens encore de ces palpitations que j’éprouvais, de ces frissons que me parcouraient le dos. Ce fut mon premier grand amour qui dura un an et cent vingt-quatre jours. Aussi non, le remariage de mes parents fut un immense moment de pur bonheur. Ce sont toutes ces petites choses qui nous donnent la force de vivre et la force de vaincre ce mal-être en étant ados.

• Comme tous les autres habitants, vous faites parti, bien évidemment, d'un milieu aisé. Mais alors, comment le vivez-vous? Jouissez-vous pleinement de votre richesse ou préférez-vous laisser celle-ci de coté et profiter de la vie en toute simplicité?
Je ne peux pas dire que je dépense énormément et que je me vante à chaque coin de rue. La richesse à Oxymore est quelque chose de normal et je pense que tout le monde en profite à sa façon. Pour ma part, j’aime faire plaisir à mes proches et me faire plaisir à moi. Je dépense mon argent en vêtements et surtout en chaussures. J’aime acheter des CD et les mettre sur iTunes pour après, n’écouter que quatre chansons. L’argent n’est pas un problème et quand bien même, il ne fait pas la totalité bonheur.

• Quelles sont vos affinités avec les autres habitants de l'île ? À votre arrivée, avez-vous bien réussi à vous intégrer ? De manière général, nous devons savoir si vous êtes une personne facile à vivre qui ne nuira pas à Oxymore, mais nous ne nous inquiétons guère.
Je peux compter mes vrais amis sur mes dix doigts. Je n’ai pas besoin d’avoir des vingtaines de personnes autour de moi pour me sentir bien. Je sais que je peux compter sur mes meilleurs amis, quoi qu’il arrive. On écoute et on ne juge pas, c’est ça les vrais amis. Je sais que je suis du genre à dire: « Tout le monde est beau, tout le monde est gentil.» Mais ce n’est pas pour cela que je vais aller me confier à la première personne que je rencontre dans le rayon biscuits au supermarché.

• Pour finir, comment vous imaginez-vous dans une dizaine d'années ? Oxymore sera-t-il votre futur ? Avez-vous des projets, des rêves qui vous tiennent à coeur et que vous aimeriez réaliser ? Et qu'espérez-vous devenir ?
Dans dix ans ? Oula, j’en aurai trente et un. C’est assez difficile de s’imaginer dans le futur, surtout que j’aime vivre le moment présent. Mais j’ai quelques espérances comme un mari, qui serait la quand je rentrerai le soir, un enfant, peut-être, qui sait ? En tout cas, je ne me vois pas mère au foyer, c’est certain. J’espère avoir mon petit job à moi et être l’épouse et la mère parfaite, comme toutes les femmes le souhaitent.